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La route du Pamir en sidecar Ural (2/2)

    Ça y est : nous arpentons enfin les sommets pamiriens ! Après avoir franchi un col à 4655m d’altitude et arpenté des pistes à flanc de falaise, nous rallions maintenant la vallée de la Panj marquant la frontière avec l’Afghanistan. Sa particularité ? Elle abrite des paysages absolument irréels ! Dans cet article, nous te racontons la deuxième partie de nos péripéties au Tadjikistan sur notre fière monture à trois roues. Bonne lecture !

    Itinéraire de notre road-trip au Tadjikistan

    Les villages de la vallée de la Panj

    Les rives verdoyantes de la Panj

    Arrivés à Zong, nous faisons le plein d’eau, de pâtes et d’essence. Encore une fois, la station essence est « primitive » : de larges bidons dans un vieux container où l’on sert le 92 dans un seau. Ici, la rivière Pamir se sépare en deux : la Wakhan traverse le Corridor en direction du Tibet, alors que la Panj continue à l’ouest reprenant le rôle de séparation entre le Tadjikistan de l’Afghanistan. Nous suivons cette dernière. Les villages fleurissent, les arbres apparaissent, les rives de la Panj sont pleines de vie. Quel bonheur de retrouver un peu d’ombre au pied des peupliers. Nous profitons à fond de de cette végétation luxuriante tant elle nous avait manqué !

    À Yamchun, nous partons à l’assaut des montagnes. L’objectif ? Rallier les sources d’eau chaude de Bibi Fatiman. Ça grimpe méchamment. La piste virevolte entre les minuscules villages pour prendre de la hauteur. Finalement, nous atteignons les sources, mais il est trop tard. Elles sont fermées… les paysages sont extraordinaires donc nous ne sommes qu’à moitié frustrés. Nous bivouaquons sur le parking de la guesthouse Vakhon pour une somme modique. Pourquoi pas en pleine nature ? Euh… on avait vraiment besoin d’une douche.

    Le lendemain, la piste qui redescend nous offre une vue imprenable sur la forteresse de Yamchun. Cet avant-poste, surplombant la vallée de Wakhan, est un vestige de l’époque où la route de la soie battait son plein. Dans ces places fortes, les marchands de passage pouvaient dormir sur leurs deux oreilles moyennant un droit de séjour. Nous contemplons ces vestiges, admirant les cimes afghanes en toile de fond. Derrière ces sommets ? C’est le Pakistan.

    Les villages du Pamir : de vraies oasis de verdure

    À chaque traversée de village, des enfants nous font coucou à grand renfort de sourires spontanés. Quel plaisir ! Les adultes aussi nous saluent avec un regard empreint de joie et de curiosité. On se croirait comme la reine d’Angleterre en parade ! Sais-tu pourquoi nous adorons les villages pamiriens ? Ils sont verdoyants. Étroits, tout en longueur, ils s’étendent sur une petite bande de terre fertile située entre la rivière et la montagne. C’est étonnant de voir le contraste entre ce fin couloir luxuriant et l’aridité des montagnes quelques mètres derrière. Ici, les arbres sont nombreux, le blé pousse, l’eau coule à flot. Rigoles, canaux, digues, ces villageois pamiriens semblent être passés maîtres pour maitriser l’eau de fonte des neiges et lutter contre le désert.

    De manière générale, arpenter les courbes de la Panj est un vrai bonheur (si on met de côté l’affreuse tôle ondulée des pistes). Les sections sableuses alternent avec de la caillasse, mais les décors de cette vallée fertile sont extraordinaires. Côté afghan, on admire aussi quelques hameaux posés au milieu de ces oasis de verdure créés par la main de l’homme et le ruissellement des eaux de fonte des neiges. Le vent souffle. Le sable en suspension voile le ciel. La scène est carrément irréelle.

    Les sources d’eau chaude au doux parfum d’œuf pourri

    Nous voici à Garm-Chasma pour notre cure thermale ! Et oui, nous profitons de source naturelle d’eau chaude pour nous détendre un peu. La température varie entre 40 et 50 degrés avec ce délicat fumet d’œuf pourri dû au souffre. Ce qu’on adore ? Les stalactites et les pierres marronnâtes qui entourent cette piscine presque-naturelle. Au passage, ici, tout le monde se baigne à poils (enfin hommes et femmes séparés bien sûr). Aucun maillot de bain à l’horizon. Bon, alors, c’est peut-être bénéfique pour la circulation sanguine, la peau, le stress, etc… Mais t’as clairement pas l’impression de ressortir plus propre. Alors, on se rince dans la rivière juste à côté sous les regards incrédules des locaux. Il faut dire que l’eau de fonte des neiges n’est pas la plus chaude qu’on ait connu.

    Nous reprenons ensuite notre chemin contemplatif le long de la Panj. Tantôt tranquille, tantôt torrentielle, chaque méandre donne lieu à un nouveau spectacle, un nouveau décor. « HELLO !! », crie-t-on à un Afghan de l’autre côté de la rivière. Il nous répond par un salut de la main et un grand sourire. Seulement 50m nous séparent ! Nous nous arrêtons dans un hameau pour donner des ballons de foot aux enfants, préférant passer par l’intermédiaire d’un adulte, nous allons à la rencontre d’un homme. Il s’avère qu’il est professeur de musique. Il nous invite chez lui à prendre le thé et grignoter. Il se met même à chanter du Bon Jovi (en yaourt). Génial !

    Ultime obstacle : un interminable chantier

    Un départ de nuit
    Nous arrivons finalement à Khorog, capitale du Haut-Badakhchan, là où la M41 et la Wakhan se rejoignent. Nous passons ensuite la confluence avec la vallée de Bartang (le 3ème moyen de traverser la Pamir). Le hic sur cette route ? Elle est en travaux. On en entend parler depuis des mois. Tous les voyageurs nous le disent : « c’est un vrai calvaire ! ». Il faut dire qu’on est sur de la mega-rénovation routière, d’une cinquantaine de kilomètres, avec les joies d’un chantier à flanc de montagne et organisé par une entreprise chinoise. D’ailleurs, ils ne s’embêtent pas : la route est fermée de 08h à 12h et de 13h à 18h. Tu vois ce que ça implique ? D’énormes bouchons. Et oui la M41 est l’axe principal de la région connectant la Chine à l’Ouzbékistan.

    Certains, comme Margaux (etonvaoumaintenant), choisissent l’option tôt le matin. Échec. En effet, en se présentant à 6h du mat, une horde de camions surchargés était déjà présente. Nous optons donc pour le franchissement de nuit. Bonne idée ? Pas sûr. On verra. 19h, la nuit tombe. Nous nous pointons au début du chantier. C’est parti pour 50 bornes de piste caillasseuse en mode nocturne ! Alors, globalement, il n’y a pas de passage technique. C’est tantôt sableux, tantôt rocailleux, il y a de belles déclivités, mais pas vraiment de challenge.

    La vraie difficulté ? L’obscurité totale. Dans ces conditions, croiser un camion sur ces pistes étroites relève de l’acrobatie. Ne pas savoir où se situe le ravin n’a rien de rassurant. Et ne pas distinguer à plus de 20 mètres réserve son lot de surprises plus ou moins bonnes. De plus, chaque véhicule soulève un généreux panache de sable et de poussière. Résultat ? Nous devons prendre nos distances avec Oscar, notre camarade d’aventure. Nous faisons halte tous les 10km pour s’assurer que tout le monde suit. L’avantage, il n’y presque personne, quelques camions, des militaires qui patrouillent et un cycliste voyageur. C’est bon, on a trouvé plus taré que nous !

    La menace talibane à quelques dizaines de mètres

    Soudain, nous sommes surpris par un troupeau d’étoiles dans le ciel. Très localisée, cette galaxie lointaine arbore des points lumineux verts, blancs et rouges. Il nous faut quelques secondes pour comprendre que c’est en fait un village afghan perché dans les montagnes de l’autre côté de la rivière Panj. La galaxie lointaine est à 50m de distance.

    D’ailleurs, Sais-tu ce qui nous tracasse un peu ? La présence potentielle des talibans. Plusieurs voyageurs que nous avons croisés en ont vus, armés. De plus il y a quelques mois, des touristes auraient même été mis en joue par ces guerriers afghans. Ce qui nous rassure : les nombreuses patrouilles de militaires que l’on croise. À pieds et sans lumière, ils arpentent cette zone sensible à longueur de journée et de nuit, s’assurant que les afghans restent en Afghanistan et qu’un touriste inconscient n’ait pas l’idée saugrenue de bivouaquer ici. Nous continuons cette odyssée nocturne jusqu’à la sortie de la zone de chantier.

    À partir d’ici, la route est ouverte toute la journée. Ouf ! Nous poussons un soupir de soulagement. Le plus dur est derrière nous. La dernière difficulté ? Trouver un spot sûr pour planter la tente. Il est 22h00, nuit noire. Nous demandons conseil à un passant. Il nous indique un spot à 10 mètres avec une précision extrême : « Tent, here. Motorbike, here ». Ok. Assez peu rassurés, nous lui demandons si le lieu est en sécurité vis à vis des voisins aux turbans. Il nous garantit que oui.

    Ce que nous découvrons le lendemain ? En plus d’être parfaitement dissimulés dans les bois, nous sommes à 20 mètres d’une caserne militaire ! En termes de sécurité, on ne pouvait rêver mieux.
    D’ailleurs, nous recevons la visite des soldats intrigués. On cause moto et voyages, l’ambiance est détendue. Les gamins curieux du village aussi passent nous voir. Enfin, notre indic d’hier, qui s’avère être le voisin, passe nous apporter le petit-déjeuner. Génial ! 30 bornes plus loin, nous retrouvons l’asphalte, et après encore 200 kilomètres, nous rallions la capitale : Douchanbé.

    C’est ainsi que notre aventure tadjike touche à sa fin ! Depuis le temps que l’on fantasmait sur la Pamir, c’est maintenant un rêve accompli. Ce qui nous aura le plus marqué ? Le contraste entre les hauts plateaux arides désertiques et les paysages si particuliers longeant la rivière Panj. Entre l’ocre des montagnes, le bleu du cours d’eau et le vert luxuriant des villages tadjiks : les décors sont absolument merveilleux. Bonne route à toi !
    >> Lire les autres articles sur nos road-trips en Asie centrale

    6 commentaires sur “La route du Pamir en sidecar Ural (2/2)”

    1. Bonjour,
      Bravo pour vos reportages, belles descriptions et belles images.
      J’espère vous rencontrer un jour. Est-ce que vous venez au SVA ?
      Bernard.

      1. Bonjour Bernard,
        Merci pour ton message 🙂
        Oui, nous serons au SVA à Corcoué-sur-Logne, le week-end du 20 avril.
        Peut-être à bientôt !

        Marion et Jérémy

    2. Bonjour à vous,
      Ça fait vraiment rêver. Projetant un voyage en moto en 2025 jusqu’au Kirghizistan et après vous avoir suivi, j’ai vraiment envie de passer par cette route pour revenir !
      Bravo
      François

      1. Merci pour ton message 🙂
        Nous ne pouvons que t’encourager à emprunter cette route 🙂
        Il faut juste anticiper la demande de permis de séjour GBAO (2 ou 3 semaines avant) et vérifier que la frontière Kirghizistan/Tadjikistan est bien ouverte. Il y a un conflit plus ou moins larvé entre les deux pays et la frontière est régulièrement fermée.
        Pour le Kirghizistan, nous te conseillons vraiment le guide d’aventure d’Ountravela « Explore Kirghizistan ». Il est génial pour préparer son voyage (en rêvant) et ensuite découvrir ce pays (il y a un lien dans nos articles à propos du Kirghizistan vers leur boutique en ligne).

        Bonne route !
        Marion et Jérémy

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