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La route du Pamir en sidecar Ural (1/2)

    Depuis les prémices de l’élaboration de ce voyage, la région du Pamir est un essentiel de notre to-do list ! Tellement de légendes gravitent autour de cette région mythique au Tadjikistan. Et voilà, nous y sommes enfin ! La grande inconnue ? Le niveau de difficulté des pistes. Les différents retours d’expérience que nous avons reçus sont contradictoires si bien que l’on ne sait pas si c’est à peu près roulant ou digne d’une épreuve d’enduro hardcore. Stress et excitation sont au rendez-vous ! Dans cet article, nous te racontons notre traversée du Pamir et du Tadjikistan. Bonne lecture !

    Itinéraire de notre road-trip au Tadjikistan

    Conduire au Tadjikistan ou info à savoir

    Conduite locale

    Alors, on ne va pas se mentir, nous n’avons pas croisé grand monde sur la Pamir. Difficile donc de juger. Par contre, nous avons passé quelques jours à Dushanbe, la capitale tadjik. Les locaux nous ont semblé assez courtois et plutôt respectueux des autres usagers de la route. Bien sûr cela est relatif, nous sommes loin des normes de conduite européennes.

    Réseau routier

    Là, il faut bien distinguer la Pamir et le reste du pays. Concernant la Pamir, la M41 est dans un état assez aléatoire. En effet, les sections au bitume correct alternent avec des passages ou l’asphalt est simplement inexistant. Dans la vallée de Wakhan, c’est uniquement de la piste (tôle ondulée), mais on vient là pour ça, non ? Caillouteuse et sableuse, il n’y a rien de vraiment technique. Les axes principaux que nous avons emprunté étaient globalement dans un état correct. Quantité de nids de poule limitée ce qui permet de rouler assez sereinement.

    Qualité de l’essence

    Sur la Pamir highway, les stations essence sont rares et le 92 y est servi au seau. Toutefois, il est d’assez bonne qualité. À Doushanbe, les stations sont modernes, distribuent majoritairement du 92, rarement du 95.

    Boire ou conduire
    Tolérance 0.

    Nos débuts sur la mythique M41 alias la route du Pamir

    Des démarches d’entrée étonnantes

    Une longue route en mauvais état grimpe dans les montagnes. Elle nous mène au poste frontière kirghiz. Le contrôle des bagages est poussé. « Qu’avez-vous fait pendant ce mois et demi au Kirghizistan ? » nous demande le douanier, étonné que nous y soyons restés aussi longtemps. Bah, on a été à Issik Kul, Engilchek, Song Kul, Kol Suu, Bishkek, Osh… Nous lui énumérons la liste des pépites que nous avons découvertes grâce au guide d’aventure « Explore Kirghizistan » d’Ountravela. Il semble content que nous ayons pris le temps de visiter son pays en profondeur.

    La particularité de ce passage de frontière ? Nous n’entrons pas seulement au Tadjikistan, mais spécifiquement dans la région du GBAO. Quésaco ? Il s’agit de la province autonome du Haut-Badakhchan. Cet oblast tadjik couvre 40% de la surface du pays mais ne représente que 3% de sa population. Très peu dense donc ! Pénétrer dans cette région indépendante implique quoi ? Des démarches administratives. Par exemple, nous avons dû envoyer un mail (tourism.department@tourism.gov.kg) accompagné de nos passeports pour prévenir les autorités de notre entrée sur le territoire. De plus, il nous a fallu demander un permis de séjour GBAO, alors que le reste du pays ne requiert pas de visa pour des séjours de moins de 30 jours.

    Bref… mais connais-tu la meilleure ? Le poste frontière de Kizil Art – celui que nous empruntons – était fermé aux étrangers depuis des mois ! Il a ouvert seulement une semaine avant notre passage. Pour une fois, les planètes s’alignent en notre faveur !

    Un pied au Kirghizistan, l’autre au Tadjikistan

    Nous continuons notre ascension. Gobi a la pêche. Il a beau n’être constitué que de pièces mécaniques, on sent que lui aussi est pressé de parcourir la mythique Pamir Highway. Finalement, nous rallions le sommet ! Le moment inoubliable ? Nous pique-niquons ici, à 4300m d’altitude, à cheval entre le Kirghizistan et le Tadjikistan. Le plus beau no-man’s land que nous ayons traversé. Bon, alors, sans la simili tempête de neige, ce fut été encore mieux, mais bon… c’est l’aventure ! Après le café, nous changeons les gicleurs à nouveau. Jérémy installe le modèle le plus étroit, prévu pour ces altitudes généreuses. En 15 minutes, l’affaire est pliée ! Pas mal comme chrono, non ?

    Ah mais au fait, nous ne t’avons pas présenté notre nouveau camarade d’aventure ? Oscar est un motard français qui roule jusqu’à Singapour. À noter qu’Oscar a une certaine propension au zig zag. La ligne droite l’ennuie. L’asphalte aussi. On peut le comprendre. Pourquoi avoir décidé de parcourir le Pamir ensemble ? C’est vrai, nous n’avons pas exactement la même allure. En fait, c’est plutôt simple : Il ne voulait pas s’engager dans cette aventure seul. Nous non plus. Il faut dire que la région est tellement désertique, peu peuplée et isolée de tout, que le moindre pépin mécanique ou physique peut rapidement prendre des proportions catastrophiques. Fin d’aparté.

    Nous passons maintenant le poste frontière tadjik. Le décor ? Une épave d’Ural, des bâtiments délabrés, des crânes d’animaux, une ambiance digne de Mad Max. Pourtant, c’est bien notre point d’entrée dans le pays. Présentation des passeports, de la carte grise et des précieux permis GBAO et nous voici au Tadjikistan ! Youpi !

    Deux sidecars Ural sur les sommets du Pamir

    Nous reprenons la route. Progressivement, nous voyons le lac Karakul se dessiner au loin. Plus nous nous approchons, mieux nous pouvons en apprécier les couleurs fantastiques. Une subtile palette de bleu allant du turquoise au marine avec les montagnes en arrière-plan. Quid du village de Karakul ? Les maisons blanches de plain-pied avec toiture plate, sont construites en terre crue. Nous ne croisons que deux ou trois personnes. C’est très calme ici. On se demande de quoi peuvent bien vivre les gens ici. C’est vrai, il est impossible d’y cultiver quoique ce soit, de faire paitre des troupeaux, quant aux touristes, ils ne sont pas légion.

    Nous continuons à longer le lac quand soudain, une silhouette familière se dessine au loin. Un side-car ? Un flat twin ? Oui, c’est bien un Ural ! On se fait des grands signes, on s’arrête. Les accolades sont franches. Nous sommes absolument au milieu de nulle part. C’est génial. Toutefois, ce n’est pas tout à fait une surprise car nous connaissons ces aventuriers. Qui sont-ils ? Ellie et Austin, de @sidebysidecar, tout droit venus du Colorado. Enfin, tout droit reste une notion abstraite car ils sont passé par la France, l’Italie, la Suède etc… C’est génial de pouvoir échanger avec d’autres Uralistes à propos de l’aura géniale que dégage le trois-pattes, les petites galères mécaniques ainsi que le rythme général. Tu vois, par exemple, eux aussi roulent à 70km/h de moyenne en parcourant 100 à 150 bornes par jour.

    Rouler à 4655m d’altitude : c’est fait !

    Après d’intarissables conversations sur l’Ural et le voyage, nous devons trop vite nous séparer. Il faut dire qu’un défi de taille nous attend : le col Ak-Baital à 4655m ! La piste est en mauvais état, mais cela reste très praticable. La fin de l’ascension se fait en première sur des pentes généreusement inclinées. Gobi ne faiblit pas ! C’est sans doute le plus haut col qu’il franchira de toute sa vie ! Et finalement, nous parvenons au sommet de ce col à très haute altitude. Oh bonheur ! Oh, joie ! Depuis le temps que nous nous demandions si l’on y arriverait, bah, c’est fait !! C’est décidé nous allons développer un culte mystique à la gloire du dieu carburateur. Cette créature mécanique d’un autre âge semble éternelle malgré son combat contre l’empire du mal : l’injection !

    Nous prenons le temps d’immortaliser le moment. Nous savons pertinemment que nous ne remettrons sans doute jamais les pieds ici. 4655m, tu te rends compte toi ? C’est comme si au sommet de l’Izoard, tu n’étais qu’à mi-chemin. Nous nous dégotons un joli endroit en bord de rivière pour camper. Dès que le soleil disparait, les températures deviennent glaciales ! Allez hop, il est à peine 20h mais nous nous réfugions dans nos duvets. Ce soir nous dormons à 4000m d’altitude ! C’est dingue !

    Mourghab et son marché en containers
    Le lendemain matin, il faut bien avouer que le sommeil ne fut pas complètement réparateur. La faute à qui ? Aux maux de tête dus au manque d’oxygénation du cerveau et puis aussi à ce groupe de tadjiks bourrés qui ont réussi à tomber en panne dans le lit de la rivière à 20m de nos tentes. Je pense que l’Ural intègre un aimant à viande saoule.

    Nous voici à Mourghab, deuxième plus grande ville de cette province autonome. Sa population ? 6500 habitants ! Et surtout, c’est la plus haute ville du pays à 3650m d’altitude. En arrivant nous apercevons un match de Kok Boru, alors c’est l’occasion de faire une petite pause pour observer les cavaliers. Ici, la station essence est assez éloignée de nos standards européens, on nous sert directement au seau ! Alors, forcément, il ne faut pas s’attendre à du 98 propret. Nous faisons halte au marché de la ville. C’est toujours une bonne manière de s’imprégner de l’ambiance générale. La particularité de celui-ci ? Il est composé de containers réhabilités. Combiné à l’atmosphère désertique et poussiéreuse, nous sommes en plein décor post-apocalyptique.

    La suite ? Parfois roulante, parfois défoncée, l’état de la route est très aléatoire et nous devons bien souvent emprunter les pistes de terre parallèles souvent en meilleur état que le « bitume ». Cela nous rappelle nos premiers tours de roue au Kazakhstan sur des « autoroutes » recouvertes de centimètres de sable.

    Bienvenue dans le Corridor de Wakhan

    Bye bye la M41, c’est reparti pour de la piste !

    Après un sublime bivouac sur les rives du lac Bulunkul, nous quittons la M41 pour nous enfoncer dans la vallée de la Wakhan. Pour ton info, il y a trois itinéraires possibles pour traverser cette région désertique. 1 : en arpentant la M41, alias la mythique Pamir Highway, assez roulante. 2 : en empruntant la vallée de Bartang, réputée archi-technique (même les locaux l’évitent). Et 3 : en longeant la frontière afghane, tout au sud du pays. Nous optons pour ce tracé, notamment pour la majestuosité des lieux.

    Premier check point militaire. Nous montrons patte blanche, puis nous longeons la rivière Pamir. C’est sublime. De l’autre côté ? C’est l’Afghanistan. Pour être plus précis, c’est le fameux corridor de Wakhan, ce bras de terre qui permet à Kaboul d’avoir une frontière directe avec la Chine. À son niveau le plus étroit, ce couloir ne fait que 20km de large. Si bien, qu’avec une vision acérée (qui traverserait les montagnes), nous pourrions distinguer les vallées pakistanaises.

    Au milieu coule une rivière

    La piste varie entre tôle ondulée, caillasse ravinée et sections sableuses. Les décors sont jaunes, voire blanc tellement le soleil éblouit tout. C’est aride, désert, rien ne pousse. Seules les berges de la Pamir présentent une once de verdure. Nous en suivons les ondulations en contemplant l’autre rive, observant ici et là des bergers afghans. Magnifique mais éprouvant !

    La piste à flanc de falaises joue aux montagnes russes. En parlant de ça, nous croisons alors notre petite famille de sidecaristes sibériens en Super Tenere attelée. On les adore !! Leur attelage maison ne montre aucun signe de faiblesse malgré l’état des pistes et leur chargement considérable (bivouac et autonomie pour 3 personnes). Une accolade, une courte discussion et nous repartons chacun dans des directions opposées.

    La piste caillouteuse n’est pas piégeuse. En fait, la vraie difficulté réside dans son isolement. Hormis les ténéristes russes, nous ne croisons presque personne. Évidemment, le réseau téléphonique est lui aussi aux abonnés absents. Alors, forcément, dans ces conditions, le moindre obstacle prend un caractère un peu flippant.

    Par exemple ? Un passage à gué un peu tumultueux. Le soleil de milieu d’après-midi fait fondre la neige à grands volumes. Alors, on repère la profondeur à pieds. Et surtout, nous vérifions qu’une caillasse piégeuse ne se cache sous le flot d’eau. L’Ural passe sans souci. Il faut bien avouer qu’avoir trois roues est un atout considérable en termes de stabilité. Pour Oscar et son Africa Twin bien chargée, la situation est un peu plus délicate. Jérémy se met en sécurité sur le côté. On y va doucement. Tout se passe bien. Un peu plus loin, nous observons la carcasse d’un camion qui a dégringolé la pente tout en contrebas. Un bref rappel qu’une erreur de conduite peut rapidement être fatale !

    Après avoir fait le plein à Mourghab dans une « station » où l’on te sert de l’essence au seau, nous nous enfonçons dans la vallée de la Wakhan. Nous y longeons la rivière Pamir. Sur l’autre rive ? C’est l’Afghanistan.  Bonne route à toi !
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