Samarcande, Khiva, Boukhara : voici autant de villes aux noms évocateurs. Avec leurs monuments en terre, paille et bois, ces cités millénaires promettent un voyage temporel à l’époque faste de la route de la soie. Ce que nous ignorions avant d’entrer en Ouzbékistan ? Nous y trouverons aussi les pires routes de notre périple. Tout un programme ! Dans cet article, nous te racontons notre émerveillement face aux villes ouzbek et notre descente en enfer au coeur du désert. Bonne lecture !
Conduire en Ouzbékistan ou info à savoir
Conduite locale
L’automobiliste ouzbek est, selon nous, l’exemple parfait de la régression néandertalienne qui peut s’opérer sur l’humain lorsqu’il a un volant entre les mains. Imprévisible et bête, il va tout tenter pour essayer de gratter une place dans un bouchon ou une demi-seconde à un feu. En dehors des villes, l’ouzbek est plus détendu mais toujours aussi imprédictible. L’état des routes, des automobilistes et la présence d’animaux en liberté prohibe l’idée même de conduire de nuit.
Réseau routier
On a rarement connu plus aléatoire. Des sections pas trop pourries alternent avec des portions carrément chaotiques. Mention spéciale pour l’itinéraire alternatif entre Boukhara et Khiva avec ses 600 bornes de nid de poule et d’ornières. Le topo ? Calés à 15km/h à slalomer entre les cratères.
Qualité de l’essence
Il faut anticiper les stations essence, la norme est le 92 voire le 80.
Boire ou conduire
Tolérance 0.
De Samarcande à Boukhara
Samarcande, un joyau d’architecture
Ouzbékistan, nous voilà !! À peine remis de nos aventures sur la Pamir, nous débarquons à Samarcande. Et nous attaquons fort avec le Registan. Comment résumer simplement ? C’est majestueux, démesuré, grandiose. On ne peut se lasser de contempler ces immenses mosaïques bleues. On apprend que ces bâtiments sont des Médersas, c’est-à-dire des écoles coraniques. C’est marrant car tout semble penché, parfois à la limite de se casser la tronche. Mais rassures-toi, ça n’enlève rien à la beauté des lieux !
Nous poursuivons avec le mausolée Gour Emir, tout aussi splendide. Sais-tu qui y repose ? Tamerlan (alias Timur), un illustre conquérant turco-mongol. En remontant la large avenue piétonne, nous rallions la Mosquée Bibi Khanym. Et là, les mots nous manquent pour décrire sa majestuosité. Bon, à défaut de mots, voici des chiffres. Elle s’étend sur 167m de long et 109m de large. Tu te rends compte ? D’ailleurs, rien que son porche, appelé Iwan, mesure 55m de haut ! Tu l’auras compris, tout est démesuré ici.
La nécropole Shah-I-Zinda (Shakhi-Zinda) ne déroge pas à ce gigantisme. En effet, cette petite avenue pavée est bordée de mausolées et tombeaux tout aussi « modestes » les uns que les autres. Dernière étape à Samarcande ? Le Siyob Bazaar. Épices, viandes, fruits, légumes, chapeaux, on trouve de tout dans ce marché !
Samarcande est magnifique, toutefois notre ressenti est un peu mitigé. Ce qui nous déçoit un peu ? On comprend rapidement que le touriste est perçu comme un portefeuille sur pattes. Il y a le tarif pour le local et celui allègrement gonflé pour les étrangers. Ça a du sens lorsqu’il s’agit d’attractions locales – nous n’avons évidemment pas le même pouvoir d’achat. Mais, on a quand même eu la sensation de se faire enfler à plusieurs occasions. Comme ce kilo de bananes dont le prix varie du simple au double en fonction de l’étal, un expresso de bord de route à plus de 2€, un enregistrement au bureau du tourisme au tarif absolument flou.
Ce n’est donc pas seulement un exercice de négociation auquel on se plierait volontiers, mais plutôt une inflation touristique institutionnalisée. C’est la première fois depuis le voyage que l’on ressent ça et ce n’est pas très agréable. Mais bon, il faut garder en tête que c’est une des destinations les plus prisées d’Eurasie…
Chevrolet forever
Tu connais la particularité du parc automobile ouzbek ? 90% des voitures sont des Chevrolet (blanches). Ici, la marque a un quasi-monopole. En fait, seulement les camions et les semi-remorques dérogent à la règle. Il faut dire que l’état est actionnaire à 90% de l’usine d’assemblage. Résultat ? Cela donne aux villes des airs de Truman Show où chaque particulier circule avec une Cobalt blanche et chaque taxi en Matiz. Étonnant ! On se croirait vraiment dans une dystopie étrange. Autre fait insolite ? la plupart des voitures roulent GPL, l’odeur de gaz imprègne toute la cité.
Boukhara et ses fortifications en terre/paille
Ici, ce ne sont pas moins de 300 hectares et 140 bâtiments qui sont inscrits à l’UNESCO. C’est énorme ! À chaque recoin de Boukhara, nous tombons face à un ouvrage incroyable. Des mentions spéciales ? La Citadelle Ark avec ses incroyables murs d’enceinte en briques, bois, terre, paille ; la mosquée Boloi Havz pour ses colonnes en bois sculptées aux allures de palmiers et enfin le minaret Kalon avec ses 48 mètres de haut. Wikipedia nous apprend que cette tour de pierre avait 3 usages : l’appel à la prière évidemment, mais elle faisait aussi office de « phare » pour les caravanes et enfin, on y jetait de son sommet les criminels notoires. Radical !
Traversée du désert Ouzbek KyzylKoum en sidecar
Sur la trace des pétroglyphes millénaires
Sur les bons conseils d’un ami side-cariste, nous partons maintenant explorer la piste des pétroglyphes. Quésaco ? Il s’agit en fait du canyon de Sarmysh où l’on peut admirer de beaux vestiges d’art rupestre : des cerfs, des chevaux des humains gravés dans la roche. C’est sidérant de se dire qu’ils ont été taillés il y a des milliers d’années. On essaye alors d’imaginer comment nos ancêtres étaient habillés, où ils dormaient, avec quels outils ils sculptaient ces rochers. Ce qu’on adore ? Ces dessins primitifs sont disséminés un peu partout dans ces gorges naturelles, alors il faut ouvrir l’œil pour dénicher les plus impressionnants. Le manque d’indications donne un côté ludique à cette exploration.
Notre challenge ouzbek : 600 bornes de nids de poule dans le désert
Nous prenons maintenant une décision plutôt douteuse. À savoir ? Contourner l’axe principal qui rallie Boukhara à Khiva. L’objectif : éviter de traverser la moitié des villages du pays et le flot d’énervés du volant qui va avec. Et accessoirement, goûter au désert ouzbek de KyzylKoum. Commence alors une longue traversée de 600 bornes, dont la moitié sur des routes défoncées au possible. En fait, c’est une épreuve aussi physique que psychologique tant l’état de la chaussée est aléatoire. L’asphalte peut être à peu près roulant sur 10km, puis soudainement, ça devient absolument chaotique avec des nids de poule et ornière de bitume. Sur ces sections défoncées, nous roulons à 15 km/h en slalomant entre les cratères.
Nous sommes seuls au monde. Pour te dire : on ne croise que 3 voitures sur les 600 bornes ! Ce qui nous stresse un peu ? Contrairement à la Mongolie où il y avait quasiment toujours une yourte en vue, là, il n’y a absolument personne. Pas un village, pas un berger, personne ! Et pas de réseau. Nous repassons alors en mode télépathe avec Gobi : « ce n’est pas le moment de faire un caprice ! « . Sinon, on est vraiment dans la m****.
Arrivés à Khiva, nous contemplons les dégâts causés par ces centaines de bornes nid-d’autruchesques : joint spi de pont HS (ça pisse l’huile), l’écrou tenant la roue de secours s’est fait la malle et la platine du top-case est fendue… Bon, comment fait-on ? Un problème après l’autre. Et puis d’abord, on décompresse en visitant la ville.
Khiva, la pépite d’Asie centrale
Pourquoi adorons-nous Khiva ? C’est un superbe exemple de ce qui est possible de construire avec simplement de la terre crue et du bois. Bon, d’accord, nous caricaturons, mais l’idée est là. En effet, cette ville fortifiée résiste aux affres du temps malgré des murs constitués uniquement d’un subtil mélange boue, paille et bois. L’uniformité de la cité, la cohérence des architectures en font un véritable bijou. Incroyable ! Alors évidemment, dans l’enceinte règne une ambiance irréaliste. Nous sommes téléportés sur Tatooine !
Au passage, je crois que notre chronologie de visite des villes ouzbeks est la bonne. C’est-à-dire ? Samarcande était une bonne entrée en matière, Boukhara nous en a mis plein les yeux, et Khiva a fini d’achever nos petites mirettes qui n’en demandaient pas tant. Si nous avions entrepris le parcours inverse, je pense que nous aurions été un brin déçu par Samarcande.
Cap sur la mer d’Aral !
Nous nous engageons alors pour 200 bornes aller-retour de bitume pourri à souhait. Tu veux savoir la meilleure ? Nous décernons à l’Ouzbékistan la palme du pire réseau routier ! Il y a presque davantage de nids de poule que d’asphalte, si bien que toutes les voitures et les camions poids lourd doivent constamment slalomer. Une vraie épreuve d’agilité (et de patience) !
Bref… nous voilà devant les vestiges de la mer d’Aral. Le décor ? Une dizaine d’épaves de bateaux posées sur un océan de sable. Et si ce spectacle est assez étonnant, je pense que le vrai intérêt de ce site est la sensibilisation écologique. C’est-à-dire ? Eh bien, c’est un bel exemple de la bêtise humaine. Pour résumer simplement, les deux fleuves alimentant l’étendue d’eau ont été détournés pour irriguer des champs de coton extrêmement gourmands qui nécessitent littéralement d’avoir les pieds dans l’eau. Il aura suffi de quelques dizaines d’années pour assécher la mer d’Aral avec à la clé une catastrophe écologique majeure. Pas très réjouissant, non ?
Une ultime épreuve avant de rallier le Kazakhstan
De retour à Kungrad, nous nous mettons en quête d’un petit resto pour déguster un dernier plov. « Là ! Des voitures sur le parking, c’est bon signe ! » Nous entrons, demandons si nous pouvons nous installer. Le personnel a l’air paumé, et nous ne parvenons pas à déterminer qui est le serveur. Et pour cause : c’est en fait un mariage ! Tu connais la meilleure ? Alors que nous faisons demi-tour, des convives insistent pour que nous restions manger. Ils nous guident même à une table avec d’autres invités ! Et 30 secondes plus tard, on nous sert un plov, des somsas, un thé, une vodka et un jus de pomme. La soeur de la mariée sert d’interprète. Marion doit boire double ration de shooter car Jérémy conduit. Dure, la vie hein ?
Les derniers 130 kilomètres avant la frontière kazakhe sont notre ultime épreuve. Les semi-remorques sont contraints à un ballet improvisé, les voitures ouzbeks surchargées en rade sont légion. Quant à nous, nous optons pour l’option piste parallèle. Et oui, le sable et la boue sont nettement moins désagréable que le bitume atomisé. Il nous faudra ensuite 3 à 4 heures pour passer côté kazakhe.
Réel plaisir à vous lire et à vous suivre ! Merci